POUTINE LE GRAND EST DE RETOUR
POUTINE LE GRAND EST DE RETOUR, et il a tiré les leçons de l’hostilité occidentale
Jean Bonnevey
Dans «Lucky Luke », la condamnation du prévenu, dans l'Ouest lointain, est annoncée par la presse, avant même l’ouverture du procès. Il en a été de même pour l’élection présidentielle russe. L’élection de Vladimir Poutine a été annoncée avant le vote. Ce qui est peu surprenant car, fraude ou pas, il était assuré de la victoire.
Ce qui est plus surprenant, c’est l’annonce d’une manifestation le lendemain du vote. Comme d’habitude, les observateurs indépendants -indépendants de qui? Certainement pas des ONG et médias anti-Poutine- ont dénoncé les fraudes.
Ainsi, "on" avait décidé qu’il y aurait des fraudes et qu'"on" les dénoncerait. Nous nous trouvons bien face à une stratégie consistant, pour le "système atlantiste", à dénoncer les élections chez les dirigeants qui lui déplaisent. Or, tout cela est cousu de fil blanc car, si il y a eu des fraudes en Russie, il y a eu, aussi, des ingérences et une campagne médiatique internationale à l’encontre d’un dirigeant à abattre. L’élection, indiscutable, est donc contestée pour délégitimer le vainqueur.
Mais cela est connu de Vladimir Poutine qui y a fait face par un discours nationaliste, la dénonciation des ingérences étrangères et des propos conciliants envers l'opposition. Ainsi les médias, qui appelaient presque à la contestation du vote dans la rue, ont passé sous silence les hommages des vaincus au vainqueur. Le nationaliste, Vladimir Jirinovski, et le social-démocrate, Sergueï Mironov, ont félicité le Premier ministre pour sa victoire.
"Nous avons réalisé beaucoup de propositions que vous avez faites", a dit M.Poutine à M.Jirinovski, lors d'un entretien téléphonique, avant d'indiquer que beaucoup restait à faire et qu'"une consolidation du Parlement et de l'ensemble de la société était nécessaire". Lors d'un entretien téléphonique avec M.Mironov, le vainqueur de la présidentielle a notamment indiqué: "là où nos objectifs et nos programmes coïncident, nous compterons sur votre soutien".
En fait, le fond du problème est ailleurs. La Russie est certainement le plus gros obstacle au contrôle des ressources énergétiques mondiales par une démocratie militante, au service des USA et de leurs clients ou alliés. La route du Kremlin a été encombrée par les mobilisations et les arrières-pensées de certains pays, derrière les bons sentiments et les grands principes.
Vladimir Poutine est un dirigeant autoritaire et un démocrate très tempéré. Il se pense cependant en phase avec son peuple et son objectif : rendre à la Russie sa grandeur et son rôle international, en assumant tout le passé, impérial et soviétique. Il sait que le "nationalisme" et la défense des spécificités historiques sont la bête noire du mondialisme. Il sait où et qui sont ses ennemis, qu’ils veulent sa peau, au moins politiquement, et peut être pas seulement.
Le Tsar en colère et le cauchemar de l'atlantisme
On a vu l'homme fort de Russie, devant ses partisans, les larmes aux yeux. Il avait du mal à contenir son émotion. Ce qui veut dire qu’il a été sensible aux critiques et tentatives de déstabilisation. Mais quid derrière les larmes ? Soyons surs que sa volonté de puissance sera encore plus assumée sur le plan diplomatique comme sur le plan du réarmement de la Russie.
En réalité, Poutine a, pendant des mois, ruminé sa rancœur. Blessé, il sera plus imprévisible que jamais. Son retour au Kremlin risque de compliquer les relations entre Moscou et l'Occident, estiment les journalistes et experts britanniques.
"Pour l'Occident, le retour de Poutine signifie que Moscou va redevenir un partenaire difficile et souvent paranoïaque (…). Avec sa réapparition sur la scène internationale, le "redémarrage" de Dimitri Medvedev et Barack Obama va se retrouver à la poubelle", écrit le journaliste du quotidien Guardian, Luke Harding.
John Lough, expert de l'institut Chatham House, se montre également pessimiste sur la perspective de développement des relations entre la Russie et le monde extérieur, évoquant le début d'une "période d'imprévisibilité". Selon lui, Vladimir Poutine pourrait profiter de cette situation, propice à la promotion de l'image d'"ennemi extérieur".
L’"ennemi extérieur" l’aura tout de même bien cherché par son hostilité viscérale, par ses ingérences indiscutables, sa stratégie de déstabilisation démocratique, bien rodée mais mise en échec. Poutine est de retour, une certaine Russie aussi. Cela ne plaît pas à tout le monde. On en fait le pari.
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